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Plus heureux que les Italiens, parce que nous sommes venus plus tard, notre langue s’est perfectionnée dans des circonstances plus favorables : c’est dans le dix-septième siècle, lorsque les disputes sans nombre, élevées dans le précédent, commençoient à cesser, ou que du moins on ne les soutenoit plus avec le même fanatisme. L’admiration pour les anciens étant mieux raisonnée, et par conséquent moins exclusive, la langue Françoise attitra l’attention des meilleurs esprits. Elle se polit par leurs soins : le goût se forma avec la poésie : les progrès en furent parmi nous aussi rapides qu’ils l’avoient été parmi les Italiens ; et, comme eux nous eûmes tout à-la-fois des poètes, des orateurs, des philosophes, et des artistes.

En vain François 1er, le protecteur des lettres, s’étoit flatté, un siècle auparavant, d’en être le restaurateur. L’érudition aveugle, qui se répandoit alors en France, éteignoit le goût qui commençoit avec Marot ; et les lettres ne pouvoient pas renaître dans un siècle fait pour admirer Ronsard.

Tout les favorisoit au contraire sous Louis XIII, lorsque Richelieu s’en déclara le protecteur. Accoutumé à être l’ame des révolutions politiques, ce grand homme voyoit avec un noble dépit celle qui se préparoit sans lui dans les esprits et dans les lettres. Jaloux en quelque sorte d’une gloire que les circonstances paroissoient lui dérober, ambitieux de concourir au moins avec elles, il voulut encore être l’ame de la révolution