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Journal

du Cap ont eſté nommez par les Hollandois Outentos, parce que dans leur Langue ils ſe ſervent ſouvent d’un mot qui ſonne comme celui-là. Ils ſont ſéparez, & indépendans les uns des autres. Ils ont un Roi ou Capitaine, à qui ils obéiſſent. Tout leur bien conſiſte en troupeaux, & ils changent de lieu ſelon que la néceſſité les y oblige. Ils n’ont gueres de Religion : ſeulement quand ils ont beſoin de pluie pour leurs pafturages, ils en demandent à un certain Eſtre qu’ils ne connoiſſent point, qu’ils ne nomment point, & qui demeure, à ce qu’ils diſent, tout là-haut, & lui offrent en ſacrifice du lait, qui eſt la meilleure choſe qu’ils ayent. Le Secrétaire de M. le Commiſſaire général les a veus au tour d’un baſſin de lait, les yeux élevez au ciel, & dans un profond ſilence : c’eſt un fort honneſte homme qu’il faut croire ſur ſa parole. Il y en a au Cap une trentaine de familles qui logent dans des cavernes, & qui de temps en temps amènent aux Hollandois des troupeaux de moutons, qu’ils troquent contre du tabac & de l’eau de vie. Ils paroiſſent bonnes gens ; ont la taille belle, l’air dégagé, aſſez maigres, de belles jambes, les dents blanches, les yeux vifs, & pleins d’eſprit, le teint baſané, toujours de bonne humeur, mais fort mal propres & puans. Ils mettent de la graiſſe à leurs cheveux ; mangent leurs pous, dont ils ne manquent pas, ſe couvrent les épaules & les parties hon-