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que j’ai de revenir ſur mes pas. Mais M. l’Ambaſſadeur m’a déterminé, en me diſant, qu’il ſeroit bien agréable de traiter avec le Roi de Siam tête à tête, & ſans interprete : c’eſt le bien de la cauſe. Je craignois encore de brouïller mon Portugais, qui ne va pas mal : mais la crainte eſtoit vaine ; le Siamois n’a aucun rapport avec toutes les Langues d’Europe. Et ſur le tout j’avois peur de n’avoir pas aſſez de temps, & peut-eſtre de tenter l’impoſſible : nous verrons.

23. Mai.

LÉtude nous conſole du mauvais temps. Les jours paſſent comme des momens : nous ne ſommes point oiſifs. Je vous envoyerai par le premier ordinaire une croix de pardieu Siamoiſe : j’ai déja quelque eſpérance. Ne vous y fiez pas : vous ſçavez que j’eſpere aiſément. Mais enfin je prononce des lettres du goſier, du nez ; & nos Miſſionnaires y ont bien de la peine. Vous ne croiriez peuteſtre pas que le peu de muſique que je ſçai, me facilite la prononciation Siamoiſe. Cela ſeroit bien joli, ſi je pouvois entretenir le Roi de Siam à mon aiſe. Il n’en ſeroit point fâché, lui qui eſt ſi curieux. J’aurois bien des choſes à lui dire, & j’entrerois quelquefois dans le cabinet.

24 Mai.