la barre : on travaille toujours. A peine eſt-on arrivé dans le port ſouhaité, on n’entend que coups de marteau : le navire a travaillé, il ſaut le raccommoder, le reſſerrer, le calfater ; il faut faire de l’eau pour trois mois ; il faut ranger le fonds de cale. On n’a pas le temps de s’ennuyer : & n’euſt-on rien à faire, n’euſt-on papier, encre, ni plume ; les ſeules queſtions, Que fait-on-là ? rempliroient le temps.
Un bon dîner fait oublier trois mois de mauvaiſe chere. Des ſolles à la maniere d’Europe, un gros poiſſon blanc qui a une trompe comme un éléphant, des ſalades, du raiſin, des melons, des œufs frais : nous allons tâcher de nous rafraîchir. Enſuite nous nous réchaufferons d’ici à Breſt : il faudra s’aller rafraîchir à Gournai.
IL fait un Sueſt ſi terrible, que nous ne fçaurions aller à terre. Il y a trois ou quatre gardes-marine, qui n’ont pu revenir coucher à bord. Les chaloupes n’oſeroient ſe haſarder. Nous venons tout à l’heure d’en voir virer une Hollandoiſe : les hommes ſe ſont ſauvez, parce qu’ils ſçavoient nager, qu’on les a ſecourus, & que la marée portoit à terre. Enfin nous voici comme en pleine mer ſans ſalade, ſans poiſſon, ſans œufs : cela n’eſt point plaiſant.
M. le Gouverneur du Cap eſt aſſez familier.