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du Voyage de Siam.

9. Mars.

ON appareilla hier au ſoir avec les deux baſſes voiles : cela nous a un peu ſoutenus pendant la nuit ; mais ce matin calme tout plat. Voici un étrange païs : ou calme, ou furie de vent. Quand on eſt en calme, on ne ſçait que faire. Sondons : nos pilotes ſe croyent à plus de cent lieuës du banc des Aiguilles, où il y a fonds. N’importe, ſondons : on ſonde ; & aprés avoir lâché 110. braſſes, le pilote crie, terre, fonds. Grande joie : Quoi nous ſerions ſur le banc ! On meſure déja le chemin juſqu’au Cap : il n’y a plus que ſoixante lieuës. Chaque pilote ſonge déja à s’excuſer : j’ai toujours dit que nous eſtions plus de l’avant ; ce ſont les courans qui nous ont portez. Mais, helas, courte joie : on file le plomb, & il n’apporte rien, ni ſable, ni vaſe, ni marque de roche ; il n’a point touché terre. Il faut reſonder : on ne trouve plus rien ; la terre eſt fonduë, & les abîmes ſont revenus. Nous revoici encore à cent quarante lieuës du Cap.

10. Mars.

HIer, à ſix heures du ſoir, s’éleva un bon Nordeſt quart de Nord, qui nous mene à la route. Nous avons peur d’eſtre trop dérivez vers le Sud : il nous faudroit une bonne hauteur pour nous relever. On voit un navire : arrive deſſus. C’eſt

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