Page:Choisy - Journal du voyage de Siam, 1687.djvu/363

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
355
du Voyage de Siam.

Les Chinois ſe retirerent ; & le Roi de Tonquin demeura paiſible poſſeſſeur de tout ſon royaume. Il fit auſſitôt aſſembler ! tous les Grands de ſon état : & pour témoigner ſa reconnoiſſance à ſon Général, il le déclara lui, & ſes décendans, Gouverneur général & irrévocable du Tonquin pour la guerre, paix, juſtice, police, &c. avec cette réſerve toutefois que lui & ſes ſucceſſeurs auroient toujours le pouvoir ſouverain ; que tous les actes ſe paſſeroient en ſon nom, que l’on ne battoit monoie qu’à ſon coin ; que le Gouverneur général ne feroit rien d’important ſans ſon ordre ſpécial ; qu’il le reconnoîtroit tous les ans pour ſon Seigneur en préſence des Grands du royaume ; qu’il lui prêteroit le ſerment de fidélité. Il ſe réferva encore un certain nombre de ſoldats pour ſa ſeureté, & de rentes pour ſa ſubſiſtance. Ainſi au lieu d’un Roi, on en vit deux dans le Tonquin, le premier ne ſongeant qu’à ſes plaiſirs, & le ſecond ayant en main toute l’autorité. Le premier s’appella Bua, & le ſecond Chua. On a veu preſque la même choſe en France ſous les Rois fainéans, qui avoient des Maires du Palais.

Le premier Chua du Tonquin n’avoit qu’un fils fort jeune, & une fille qu’il maria à un Tonquinois. A ſa mort ſon gendre, qui eſtoit fort habile, ſe ſaiſit du gouvernement. Il vouloit faire mourir le jeune prince, mais ſa femme l’en empêcha ; & pour s’en défaire plus honnêtement,

Y y ij