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du Voyage de Siam.

29. Décembre.

LE même temps ; & de plus je ſuis bien triſte. Mon cœur ne tient gueres : il me ſemble qu’à tous momens je m’en vais le cracher dans la mer.

La hauteur eſt de 5. degrez 22. minutes. Nous avançons. Quand nous aurons gagné les Iſles, la mer deviendra douce, & chacun aura la tête libre.

30. Décembre.

IL a plu toute la nuit. La mer eſt fort groſſe, & point de vent : c’eſt le moyen d’eſtre bien bercez. La Maligne que nous méprisons en venant, a bien ſa revanche : elle va mieux que nous, parce qu’elle eſt nette, & que nous ſommes ſales. Elle a eſté quelque temps dans la riviere de Siam ; l’eau douce l’a nettoyée : & notre Oiſeau qui n’a point quitté la rade, eſt chargé d’un demi-pié de coquillage.

M. l’Abbé de Lionne a la fievre. Il a pris beaucoup ſur lui depuis que nous ſommes à Siam ; trois jours de roulis là-deſſus : en voilà aſſez pour altérer un tempérament auſſi délicat que le lien.

La nuit approche, il fait bon frais, & nous ne voyons point Poltimont : il faut pourtant le voir, autrement nous pourrions bien mettre à la Cape. Gens ſages ne vont point s’aventurer dans des Iſles, quand la nuit eſt noire. Terre : on crie Terre,

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