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Journal

24. Mars.

HO pour cette fois-ci il faut batre la calabre. D’où vient la façon de parler ? Eſt-ce qu’il y a des campagnes en Calabre ? Je n’ai abſolument rien à vous dire ; & ne puis me ſauver, qu’en vous faiſant la peinture de la vie que nous menons. Elle eſt delicieuſe. Notre conſcience eſt en repos : comment pourrions-nous faire pour la troubler ? les occaſions ſont un peu éloignées. Nous faiſons fort bonne chere : ce n’eſt pas la table de M. le M. de S. mais on a faim, & la mer influë dans tout ce qu’on mange un petit ſel qui fait merveilles. On dort ſous la pompe ; & quand de quatre heures en quatre heures on change le quart, & que la moitié de l’équipage va veiller pendant que l’autre va dormir, le grand bruit peut bien réveiller, mais on ſe rendort auſſi-tôt. Quant à la converſation, on l’a telle qu’on la veut avoir ; & il y a bien de petites villes en France où il n’y a pas tant de gens d’eſprit que dans notre vaiſſeau. M. l’Elu, M. l’Aſſeſſeur, & même ſouvent M. le Lieutenant général ne tiendroient pas contre nous. Je voudrois bien qu’ils vinſſent diſputer de philoſophie, qu’ils nous fiſſent un défi ſur l’hiſtoire, qu’ils nous montraſſentla barbe des ſatellites de Jupiter : comme ils ſeroient repouſſez à la baricade. Serieuſement nous n’avons ici qu’a ſouhaiter. Pour moi, qui ne ſçai

pas.