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Journal

ſçai, qui jamais le pourra ſçavoir ? Outre ce que je puis faire par moi-même, j’ai ſix Jéſuites en campagne qui tous rapportent le ſoir quelque nouvelle connoiſſance ; & vous aurez le précis de tout cela. Attendez donc encore quelques jours. Je ne vous dirai que les choſes dont je ſerai bien aſſuré. J’ai eſté chez le ſeul Libraire de Batavie chercher des livres du païs : il n’en fait pas de cas ; mais à toute force il me vouloit vendre le Mercure Galant.

Le Pere Fuciti eſt venu à bord. C’eſt un vénérable vieillard, qui a eſté prés de trente ans à la Cochinchine ou au Tonquin. Sa vie paſſée lui met ſur le viſage une gayeté perpétuelle. Il viendra avec nous à Siam, & je croi que M. l’Ambaſſadeur le remènera en Europe. J’en ſuis bien aiſe ; car il a la vraie phiſionomie d’un Saint. Nos Jéſuites ſont logez avec lui dans le jardin de M. le Général qui les ſait traiter à la Françoiſe avec magnificence. Ils eſtoient bien au Cap : mais ici cela va encore d’un autre air. Ils vont dreſſer leurs machines pour au moins payer leur hôte avec un peu de Jupiter & de Mercure.

Un de nos matelots vient de ſe noyer en ſe baignant dans la riviere : il y avoit pié partout. Dés que ſes camarades l’ont veu aller à fonds, ils ſe ſont jettez aprés, & l’ont retiré par un pié déja étouffé. On va le reporter à bord pour prier Dieu pour lui, & le jetter à la mer. Il n’y avoit

qu’un