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du Voyage de Siam.

ce eſt bien loin, & nous voici à la côte de Java, à huit lieuës de Bantam, à 18. & 20. braſſes d’eau. Bon fonds, vaze & ſable ; de ſorte que ſi le calme vient, nous mouïllerons. On voit de tous cotez des bateaux à la pêche : apparemment ils viendront à bord, & nous apporteront des rafraîchiſſemens.

Je ſuis un grand prophete. Le calme eſt venu ; nous avons mouïllé, & voici au tour de nous une douzaine de petits bateaux chargez de poules, de canars, de bananes, de figues, de cocos. Peut-eſtre que notre goût n’eſt pas encore fait aux fruits Indiens ; mais franchement les figues ſont pâteuſes, les bananes ſont fades. Il eſt vrai que dans les cocos il y a une chopine d’eau fort claire, fort fraîche, & fort agréable : c’eſt une limonade naturelle. Tous ces bons Javans ne ſe ſoucient point d’argent : des épingles, des éguilles, des couteaux, & ils vuident leurs petits bâteaux. Ils ſont aſſez ſemblables aux canots des Amériquains : vous en avez veu ſur le canal de Fontainebleau. Il en eſt venu un plus grand, où il y avoit dix hommes : tout le bâtiment, mâts, vergue, voiles, cordages, juſqu’aux ancres tout eſt de coco. Ces hommes ſont aſſez noirs, mais fort bien faits ; la taille belle, & le viſage agréable, de grands yeux noirs, la bouche petite : ils ne ſont point dégoutans comme les Outentos. Ils parlent la langue Malaie ; & perſonne dans le vaiſſeau ne

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