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du Voyage de Siam.

lendemain, & depuis ce moment-là je ne me ſuis pas défendu : j’ai perdu toutes les cinq parties, ſans en gagner pas une, quoi-que je m’y ſois appliqué de toutes mes forces. Je fus aſſez fâché dans le moment ; mais depuis la réfléxion, j’ai eu beaucoup de conſolation de voir ma priere exaucée. Il y a peut-eſtre de la vanité à vous dire ceci : mais pourquoi y en auroit-il ? Si j’ai eu une bonne penſée, vient-elle de moi ? & n’eſt-ce pas Dieu qui me l’a envoyée ?

29. Juillet.

ALerte, alerte, le vent eſt ſur les voiles ; largue l’écoute, hale la bouline. Nous eſtions ſur le pont. Tout le monde s’eſt jetté aux manœuvres & à travailler. Grande joie, c’eſt changement de temps. Courte joie, ce n’eſtoit qu’une chapelle que le pilote nous avoit laiſſé faire. Il avoit trop ſerré le vent ; & le vent impatient avoit pris la voile à l’envers : le terme eſt peu marin, & vous l’en entendrez mieux. De ſorte qu’après avoir bien travaillé, nous nous ſommes trouvez au même état, & le vent au même lieu. Je croi pourtant que ce petit accident nous a porté bonheur : le vent eſt venu ce ſoir preſque Sueſt ; & nous faiſons le Nordeſt quart d’Eſt, qui eſt preſque notre route.

Le Pere Gerbillon a prêché ſur l’Enfer, avec beaucoup d’eſprit. Il dit de fort belles choſes ;

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