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saint Sabba tous les détails du miracle céleste, détails que le saint ignorait et dont il glorifia Dieu, et lui rendit grâces, les larmes aux yeux, de ce qu’il n’a pas méprisé ses prières. Quelque temps après ces événements, par un hasard providentiel, saint Sabba fut obligé d’aller à Constantinople, pour les affaires du monastère. L’empereur grec alors régnant, Théodore Lascaris, le reçut avec honneur et affabilité, tant à cause de ses vertus, que pour sa parenté, car Radoslav, son cousin, avait épousé la fille de l’empereur. Les affaires du monastère une fois achevées, Sabba voulut encore rendre un service utile à sa patrie. Le cœur inspiré d’en haut, le saint s’humilia d’abord devant Dieu, puis alla chez l’empereur et lui dit : Dieu, qui veut sauver le monde entier par ses bienfaits, s’est servi des bras de mon père pour rejeter loin de notre patrie tous les hérésiarques. La seule chose qui nous manque encore, c’est que dans notre empire nous n’avons pas d’archevêque serbe (qui saurait la langue du pays). C’est pourquoi je supplie votre majesté de daigner recommander à sa sainteté le patriarche, qu’il fasse sacrer l’un des frères qui se trouvent ici avec moi, et le proclamer archevêque de Serbie. L’empereur goûta beaucoup ce conseil, et sans perdre de temps il convoqua à sa cour le patriarche, le synode, les seigneurs, saint Sabba et ses frères en Dieu. Il y eut beaucoup d’avis différents et des discussions de part et d’autre, pour savoir qui d’entre eux méritait le mieux d’être archevêque. Enfin, tous se lèvent pour prier en commun, après quoi, l’empereur prend la parole, et s’adressant à saint Sabba : Tes frères, dit-il, sont certainement vertueux et saints, mais notre cœur n’est aucunement inspiré à leur égard. Nous n’avons de l’inspiration que pour toi. Il faut que tu acceptes la grâce de Dieu et que tu sois constitué premier archevêque, apôtre et instructeur de ta patrie ! Alors, tous d’une voix unanime s’écrièrent : Qu’y a-t-il à la fois de plus vénérable et de plus saint ! Quant à lui, il s’y refusa d’abord longtemps, mais convaincu à son tour, il fut dûment promu et élu en qualité d’archevêque des terres de Serbie. Le jour d’une fête heureusement survenue, le très-saint patriarche œcuménique, Herman de Constantinople, imposa les mains à saint Sabba, et le consacra archevêque de toutes les terres de Serbie.