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Lettre XCVII

Cécile Volanges à la marquise de Merteuil.

Ah ! mon Dieu, Madame, que je suis affligée ! que je suis malheureuse ! Qui me consolera dans ma peine ? qui me conseillera dans l’embarras où je me trouve ? Ce M. de Valmont !… & Danceny ! Non, l’idée de Danceny me met au désespoir… Comment vous raconter ? comment oser vous dire ?… Je ne sais comment faire. Cependant mon cœur est plein… Il faut que je parle à quelqu’un, & vous êtes la seule à qui j’ose me confier. Vous avez tant de bonté pour moi ! Mais n’en ayez pas dans ce moment-ci ; je n’en suis pas digne : que vous dirai-je ? je ne le désire point. Tout le monde ici m’a témoigné de l’intérêt aujourd’hui… ils ont tous augmenté ma peine. Je sentais tant que je ne le méritais pas ! Grondez-moi au contraire ; grondez-moi bien, car je suis bien coupable : mais après, sauvez-moi ; si vous n’avez pas la bonté de me conseiller, je mourrai de chagrin.

Apprenez donc… ma main tremble, comme vous voyez, je ne peux presque pas écrire, je me sens le visage tout en feu… Ah ! c’est bien le rouge de la honte. Hé bien ! je la souffrirai ; ce sera la première punition de ma faute. Oui, je vous dirai tout.