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remarquer que, depuis cette aventure, il ne s’est pas élevé une seule voix en faveur de Prévan, & que, même de sa part, il n’y a eu aucune réclamation.

Ces réflexions me porteraient à le soupçonner l’auteur des bruits qui courent aujourd’hui, & à regarder ces noirceurs comme l’ouvrage de sa haine & de la vengeance d’un homme qui, se voyant perdu, espère par ce moyen répandre au moins des doutes, & causer peut-être une diversion utile. Mais de quelque part que viennent ces méchancetés, le plus pressé est de les détruire. Elles tomberaient d’elles-mêmes, s’il se trouvait, comme il est vraisemblable, que MM. de Valmont & Danceny ne se fussent point parlé depuis leur malheureuse affaire, & qu’il n’y eût pas eu de papiers remis.

Dans mon impatience de vérifier ces faits, j’ai envoyé ce matin chez M. Danceny ; il n’est pas non plus à Paris. Ses gens ont dit à mon valet de chambre qu’il était parti cette nuit, sur un avis qu’il avait reçu hier, & que le lieu de son séjour était un secret. Apparemment il craint les suites de son affaire. Ce n’est donc que par vous, ma chère & digne amie, que je puis avoir les détails qui m’intéressent, & qui peuvent devenir si nécessaires à madame de Merteuil. Je vous renouvelle ma prière de me les faire parvenir le plus tôt possible.

P.S. L’indisposition de ma fille n’a eu aucune suite ; elle vous présente son respect.

Paris, ce 11 décembre 17…