mais fervente, je me soumets à ta justice ; mais pardonne à Valmont. Que mes malheurs, que je reconnais avoir mérités, ne lui soient pas un sujet de reproche, & je bénirai ta miséricorde ! » Je me suis permis, ma chère & digne amie, d’entrer dans ces détails sur un sujet que je sens bien devoir renouveler & aggraver vos douleurs, parce que je ne doute pas que cette prière de madame de Tourvel ne porte cependant une grande consolation dans votre âme.
Après que notre amie eut proféré ce peu de mots, elle se laissa retomber dans mes bras ; & elle était à peine replacée dans son lit, qu’il lui prit une faiblesse qui fut longue, mais qui céda pourtant aux secours ordinaires. Aussitôt qu’elle eut repris connaissance, elle me demanda d’envoyer chercher le père Anselme & elle ajouta : « C’est à présent le seul médecin dont j’ai besoin ; je sens que mes maux vont bientôt finir. » Elle se plaignait de beaucoup d’oppression, & elle parlait difficilement.
Peu de temps après, elle me fit remettre, par sa femme de chambre, une cassette que je vous envoie, qu’elle me dit contenir des papiers à elle, & qu’elle me chargea de vous faire passer aussitôt après sa mort[1]. Ensuite elle me parla de vous, & de votre amitié pour elle, autant que sa situation le lui permettait, & avec beaucoup d’attendrissement.
Le père Anselme arriva vers les quatre heures, & resta près d’une heure seul avec elle. Quand nous ren-
- ↑ Cette cassette contenait toutes les lettres relatives à son aventure avec M. de Valmont.