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qu’à frapper à sa fenêtre, & qu'il ouvrirait tout de suite ; & puis, vous trouverez bien le petit escalier ; & comme vous ne pourrez pas avoir de lumière, je laisserai la porte de ma chambre entrouverte, ce qui vous éclairera toujours un peu. Vous prendrez bien garde de ne pas faire de bruit, surtout en passant auprès de la petite porte de maman. Pour celle de ma femme de chambre, c’est égal, parce qu’elle m’a promis qu’elle ne se réveillerait pas ; c’est aussi une bien bonne fille ! & pour vous en aller, ça sera tout de même. A présent, nous verrons si vous viendrez.

Mon Dieu, pourquoi donc le cœur me bat-il si fort en vous écrivant ? Est-ce qu’il doit m’arriver quelque malheur, ou si c’est l’espérance de vous voir qui me trouble comme ça ? Ce que je sens bien, c’est que je ne vous ai jamais tant aimé, & que jamais je n’ai tant désiré de vous le dire. Venez donc, mon ami, mon cher ami ; que je puisse vous répéter cent fois que je vous aime, que je vous adore, que je n’aimerai jamais que vous.

J’ai trouvé moyen de faire dire à M. de Valmont que j’avais quelque chose à lui dire ; & lui, comme il est bien bon ami, il viendra sûrement demain, & je le prierai de vous remettre ma lettre tout de suite. Ainsi je vous attendrai demain au soir, & vous viendrez sans faute, si vous ne voulez pas que votre Cécile soit bien malheureuse.

Adieu, mon cher ami ; je vous embrasse de tout mon cœur.

Paris, ce 14 décembre 17… au soir.