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LES LIAISONS


Lettre XXII.

La présidente de Tourvel à Madame de Volanges.

Vous serez sans doute bien aise, madame, de connaître un trait de M. de Valmont, qui contraste beaucoup, ce me semble, avec tous ceux sous lesquels on vous l’a représenté. Il est si pénible de penser désavantageusement de qui que ce soit, si fâcheux de ne trouver que des vices chez ceux qui auraient toutes les qualités nécessaires pour faire aimer la vertu ! Enfin vous aimez tant à user d’indulgence, que c’est vous obliger que de vous donner des motifs de revenir sur un jugement trop rigoureux. M.  de Valmont me paraît fondé à espérer cette faveur, je dirais presque cette justice, & voici sur quoi je le pense.

Il a fait ce matin une de ces courses qui pouvaient faire supposer quelque projet de sa part dans les environs, comme l’idée vous en était venue ; idée que je m’accuse d’avoir saisie peut-être avec trop de vivacité. Heureusement pour lui, & surtout heureusement pour nous, puisque cela nous sauve d’être injustes, un de mes gens devait aller du même côté que lui[1], et c’est par là que ma curiosité répréhensible, mais heureuse, a été satisfaite. Il nous a rapporté que M.  de

  1. Madame de Tourvel n’ose donc pas dire que c’est par son ordre.