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LES LIAISONS

que je sais, c’est elle qui me l’a appris, & elle est si bonne que je lui dis tout ce que je pense sans être honteuse du tout. Quand elle trouve que cela n’est pas bien, elle me gronde quelquefois ; mais c’est tout doucement, & puis je l’embrasse de tout mon cœur, jusqu’à ce qu’elle ne soit plus fâchée. Au moins celle-là, je peux bien l’aimer tant que je voudrai, sans qu’il y ait du mal, & ça me fait bien du plaisir. Nous sommes pourtant convenues que je n’aurais pas l’air de l’aimer tant devant le monde, & surtout devant maman, afin qu’elle ne se méfie de rien au sujet du chevalier Danceny. Je t’assure que si je pouvais vivre toujours comme je fais à présent, je crois que je serais bien heureuse. Il n’y a que ce vilain M. de Gercourt… Mais je ne veux pas t’en parler davantage, car je redeviendrais triste. Au lieu de cela, je vais écrire au chevalier Danceny ; je ne lui parlerai que de mon amour, & non de mes chagrins, car je ne veux pas l’affliger.

Adieu, ma bonne amie. Tu vois bien que tu aurais tort de te plaindre, & que j’ai beau être occupée, comme tu dis, qu’il ne m’en reste pas moins le temps de t’aimer & de t’écrire[1].

  1. On continue de supprimer les lettres de Cécile Volanges & du chevalier Danceny, qui sont peu intéressantes, et n’annoncent aucun événement.