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LES SURVIVANTS DE LA COMMUNE

ferme dans une prison où deux Russes le gardent à vue.

Un jour, Rochefort recoit du père de Pain une lettre désolée. Son fils venait de lui écrire : « Mon procès va être instruit. On me dit que je suis sûr d’être fusillé. Je t’écris pour que tu saches au moins où et à qui réclamer mon corps. »

Aussitôt Rochefort va trouver le ministre de l’intérieur suisse, M. Héridier, et le chancelier, M. Patru. Il les intéresse au sort de son ami. Le conseil d’État s’émeut et télégraphie au chargé d’affaires à Saint-Pétersbourg, lui enjoignant de réclamer Pain comme citoyen suisse.

Celui-ci demande une audience à Alexandre II qui répond :

— On ne peut mettre en jugement un journaliste. Il s’est battu contre nous, c’est vrai, mais un reporter emploie les moyens qu’il veut.

Et voilà comment un communard a été mis en liberté par un empereur.

Un mois après, c’était à Genève. Il était minuit. Rochefort dormait. On frappe à coups redoublés à sa porte.

— Qui est là ?

— Mais c’est moi.

Il reconnaît la voix. Il ouvre et voit entrer Pain