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LES SURVIVANTS DE LA COMMUNE

La parole est à M. Balandreau, défenseur nommé d’office à Louise Michel. Mais le vœu de la grande citoyenne est de plaider elle-même, et l’honorable avocat déclare qu’il ne peut que s’incliner.

Louise Michel se lève. Elle relève son voile, et commence :

— Oui, ce procès est un procès politique ! En nous, tous les anarchistes sont accusés. Vous nous appliquez la loi des vainqueurs de 71, qui nous ont écrasés comme la meule broie le grain. À Versailles, à Satory, autour de Galliffet, partout des cadavres !

Vous êtes étonnés de m’entendre, de voir une robe de femme frôler des robes d’avocats. Vous croyez que la femme ne peut être que ménagère ou courtisane. Erreur, elle a le droit de combattre à côté de l’homme, tenant en main, non le drapeau rouge qui est cloué sur les tombes de la Commune, mais le drapeau noir de la misère.

Nous avons pillé des boulangeries ? Avons-nous pillé les boutiques de changeurs… où il y avait de l’or ? Nous avons pris du pain. Avons-nous pris des bijoux ?

Je ne connais pas de frontières ! L’humanité tout entière a droit à l’héritage de l’humanité. Et cet héritage, ce n’est pas la famine, c’est la liberté.

Vous nous reprochez d’avoir endoctriné l’armée. Pourtant, à Sedan, les soldats eussent eu le droit de