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DANS L’INDE.

bengalis et cinghalais, frêles, de figure douce. Ils glissent sans bruit, avec des gestes timides, très respectueux devant les grands et lourds Européens, devant les tranquilles et musculeux Anglais qui, en habit de soirée, le jabot resplendissant, avec une démarche d’êtres supérieurs et inabordables, pénètrent dans la vaste salle à manger.

Elle est très belle, cette salle, toute pleine d’Européens de passage, qui font des taches noires sur la foule blanche des Asiatiques. C’est ici comme un grand buffet posé au carrefour des grand’routes de la terre. À ces tables se rencontrent des voyageurs partis des points opposés du globe,… passagers du Paramatt qui fait route demain pour l’Australie et la Nouvelle-Zélande, militaires français. passagers du Calédonien qui continue ce soir vers Singapour et Saigon, Chinois qui vont visiter l’Europe, Civilians anglais qui vont administrer l’Inde.

En face de moi, quatre compatriotes, riches bourgeois fatigués de la Suisse ou de l’Écosse, qui vont faire un tour au Japon, Parisiens de naissance et de race, flâneurs du boulevard, abonnés du Figaro, habitués du Palais-Royal, admirateurs de M. Sarcey, républicains et libéraux à la façon de M. Thiers, l’un membre de plusieurs sociétés littéraires, tous les quatre produits typiques de l’éducation française, du lycée, de l’École de droit et du boulevard. Deux d’entre eux ont de la littérature et