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AVANT- PROPOS

A Monsieur Charles Oulmont.

De tous les ouvrages d’imagination inspirés par les mœurs du dix-huitième siècle — et l’on sait s’ils furent nombreux — voici peut-être le plus curieux, le plus sincère, et, à coup sur, le plus injustement méconnu.

Ce livre, qu’Edmond de Goncourt prisait à l’égal d’un chef-d’œuvre, n’est pas à proprement parler un roman, mais plutôt une suite d’ anecdotes scandaleuses , touchant la ville et la scène, reliées habilement par un écrivain moins soucieux de sa réputation que sensible à son plaisir. Œuvre amère et divertissante à la fois, où tous les faits, selon l’expression de Duclos, sont presque vrais, et que nous croirions à la lettre, si l’auteur ne s’était complu là aux pires travestissements et aux complications les plus imprévues. Il ne faut pas s’y tromper, Chevrier est un fantaisiste, et un fantaisiste d’humeur peu commune, tel qu’on n’en saurait trouver parmi les satellites de l’étoile voltairienne. Il ne croit à rien, et il montre sans cesse les scrupules d’un philosophe préoccupé de la morale d’autrui plus que de la sienne. Avec cela bon vivant, bavard, querelleur, médisant, au demeurant, vous le voyez, le meilleur fils du monde.

Que cet homme, à qui la vie fut sans indulgence, ait