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A. CHEVALLIER.

tard, lorsque je suis allé moi-même faire une inspection médicale à l’armée d’Afrique et je serais même porté à croire que le café tend à affaiblir, mais non à neutraliser les pernicieux effets de l’absinthe si malheureusement propagée aujourd’hui.

» J’ai eu occasion en 1857 de recommander l’usage du café pour les troupes de la garde réunies au camp de Châlons, lorsque j’avais l’honneur comme chef du service de santé d’assister journellement au rapport de l’Empereur ; Sa Majesté voulut bien, d’après mon avis, ordonner la distribution de ce breuvage salutaire et se faire rendre compte de ses effets. Voici du reste ce que j’en ai écrit dans mon rapport au Ministre de la guerre[1].

» L’usage du café reconnu bien utile en campagne a été introduit au camp, mais il ne devrait pas devenir un abus dans l’armée, parce que c’est à la nature du climat de déterminer l’opportunité de cet usage.

» Le café provenant de la manutention et destiné le matin à la troupe, était de fort bonne qualité, mais il contribuerait plus sûrement à stimuler les forces du soldat, si les sous-officiers chargés des distributions ne croyaient bien faire en mêlant parfois à ce café naturel une matière étrangère, la chicorée, dont la saveur est si reconnaissable et dont la propriété laxative tend à produire des effets contraires à celui du café pur. Je me suis assuré que ce mélange existait en goûtant le café au moment où il était distribué à la troupe et j’ai dû en faire l’observation au rapport de l’Empereur. M. l’intendant de la garde a pris la peine de rechercher les échantillons que M. le major général m’a remis lui-même pour les faire examiner chimiquement. Une première analyse faite par le pharmacien-major de l’hôpital de Châlons et une seconde plus décisive demandée par le Ministre au pharmacien en chef du Val-de-Grâce, n’ont laissé aucun doute sur la pureté du café provenant de la manutention, sauf quelques différences peu notables entre les échantillons. Il fallait donc que le mélange de chicorée provint de ceux qui l’aimaient sans doute de la sorte. C’est ce que l’on a ensuite reconnu.

» Il serait désirable cependant que la dégustation du café fût faite chaque matin au quartier, dans le moment de la distribution aux soldats afin d’interdire un mélange qui peut convenir à quelques hommes, mais qui doit nuire à un plus grand nombre.

» Un incontestable avantage du café c’est de neutraliser ou de détruire l’action débilitante de la chaleur et sous ce rapport les Orientaux lui attribuent une sorte de spécificité. La conséquence de cet effet est d’apaiser la soif et de prévenir ainsi les effets fâcheux des boissons froides pendant la transpiration.

  1. Rapport sur l’état sanitaire du camp de Châlons, sur le service de santé de la garde impériale et sur l’hygiène des camps. (1858).