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DU CAFÉ ET DE SES FALSIFICATIONS.

un Arménien, nommé Pascal, au coin du quai de l’École, près du Pont-Neuf. Là se réunissaient les chevaliers de Malte et les étrangers. Plus tard encore, un nommé Étienne, d’Alep, ouvrit en face du pont Saint-Michel, au coin de la rue Saint-André-des-Arts et de la rue de la Vieille-Bouclerie, un établissement orné de glaces, avec des tables de marbre. Ce café, qui est maintenant démoli, porta plus tard, et presque pendant un demi-siècle, le nom de café Cuisinier. Il était devenu historique, et l’on y montrait une table sur laquelle Bonaparte, lorsqu’il n’était qu’officier d’artillerie, avait l’habitude de prendre son café.

Le troisième café ouvert à Paris était tenu confortablement ; il existe encore[1] : c’est celui que l’on connaît sous le nom de café Procope. Ce café fut fondé en 1689 par Procope, Sicilien d’origine, rue de l’Ancienne-Comédie ; cet établissement est encore, à l’époque actuelle, très fréquenté par des médecins et par des savants.

L’usage du café a souvent provoqué des polémiques auxquelles prirent part madame de Sévigné et Fontenelle, les uns le considérant comme utile, les autres comme nuisible à la santé, et même comme toxique. C’est en parlant de cette boisson que Fontenelle, presque centenaire, disait pour défendre cette boisson : « Si le café est un poison, c’est un poison bien lent, car j’en bois plusieurs tasses par jour, depuis quatre-vingts ans, et ma santé n’en est pas encore sensiblement altérée. »

De nos jours, le café a bien encore ses détracteurs, mais l’usage qu’en font nos ouvriers, nos soldats, répond à ces attaques. Le café, selon nous, est non-seulement une boisson, mais un aliment ; c’est ce que M. Gasparin a bien démontré dans un travail que nous mentionnerons plus bas.

  1. « Cet établissement, dit M. Champouillon, était différent des autres, qui n’étaient que des cabarets dans lesquels on fumait, on buvait de la bière, et dont les gens de bonne compagnie n’osaient s’approcher. »