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A. CHEVALLIER.

qui essaya de l’employer pour combattre un assoupissement qui l’empêchait de se livrer à ses prières nocturnes. Ce moyen lui ayant réussi, les derviches suivirent son exemple, et bientôt l’usage du café se répandit à Médine et à la Mecque.

Un ouvrage d’une haute antiquité rapporte que longtemps avant son emploi en Arabie, il était connu en Afrique, et que les Arabes en rapportaient l’usage à un mufti d’Aden, qui dès le xve siècle avait fait connaître ses qualités lors du retour d’un voyage qu’il avait fait en Abyssinie.

Cet usage du café éprouva de nombreuses vicissitudes même en Orient. Dans l’empire ottoman, la consommation du café eut à vaincre des obstacles dès qu’elle devint une occasion de réunion dans les lieux publics : était-ce le café qu’on voulait défendre, ou les réunions qu’il occasionnait ? Quoi qu’il en soit, Amurat III fit une rude guerre aux consommateurs de café : ce prince ordonna la fermeture des établissements public où l’on vendait cette boisson. Après quelques intervalles de relâchement de cette sévérité, elle fut remise en vigueur, particulièrement sous la minorité de Mahomet IV ; mais en 1554, sous le règne de Soliman le Grand, le débit de cette liqueur fut toléré.

À Venise, l’usage du café remonte à 1615 ; en 1654, il était parvenu à Marseille[1]. Enfin en 1657, on en avait connaissance à Paris par le voyageur Thévenot ; il devenait de mode en 1669, grâce, dit-on, à l’initiative de l’ambassadeur de Turquie, Soliman Aga[2]. En 1672, un premier établissement, où l’on débitait publiquement le café, fut ouvert à la foire Saint-Germain ; plus tard, un autre café fut ouvert par

  1. On a imprimé que Louis XIV fut le premier qui (en 1644) en prit en France.
  2. Cet ambassadeur, renommé par son esprit et sa courtoisie, s’empressait de faire servir à ceux qui le visitaient du Cahué (du café), dont l’usage avait été introduit à Constantinople par les pèlerins venant de Médine ou de la Mecque.