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sévère révision, paraît bien n’avoir exercé d’influence durable que par ses premiers romans. The Mill on the Floss est faible, et ne subsiste guère qu’à cause de l’élément autobiographique dans le personnage de Maggie Tulliver. Mais, sauf les premiers chapitres et le sixième livre, presque tout Adam Bede est admirable. Il contient dans l’introduction au second livre la meilleure partie de la doctrine artistique de George Eliot. Adam est une création et Mrs. Poyser une créature inoubliables. Qu’un homme puisse être à la fois amoureux et religieux, mais parfaitement sincère sans tomber dans l’eau de rose ou l’eau de savon, que cet homme soit à la fois un paysan, un artisan et un gentilhomme, qu’il ait à la fois le sang chaud et la tête fraîche, voilà qui semble impossible. Tel est pourtant le personnage d’Adam Bede. Pour George Eliot, Dinah Morris était l’héroïne. Nous la trouvons impersonnelle, improbable, un peu rébarbative. Le fond du livre, c’est la faute et le châtiment d’Hetty Sorrel. Rien n’est plus pathétique que les deux voyages d’Hetty au début du livre V. Après sa condamnation, le livre est fini. Là, comme dans presque toutes les œuvres de George Eliot, il y a quelque chose de profondément humain dans le développement de l’action, du caractère, mais aussi quelque chose de profondément inhumain, inexorable, hébraïque, dans le développement des conséquences. Le positivisme rejoint l’Ancien Testament. Et c’est par ce point que nous revenons à la part de George Eliot, après les sœurs Brontë, dans le développement du roman anglais.

Il ne faut pas, pense George Eliot, que l’émancipation féminine puisse être attribuée à l’instinct. C’est sur l’intelligence que sera fondée la cité intérieure, et l’intelligence ne peut être satisfaite que par un système. Le