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l’ami de Shelley, le beau-père de George Meredith, bien que contemporain de Scott, puis de Dickens et de Thackeray, ne ressembla à personne. Il a laissé une fantastique imagination servie par un beau style étouffer ses autres dons.

Il y a des écrivains d’une nature si plastique qu’ils semblent jetés dans leur siècle pour en répéter tous les cris, en imiter tous les mouvements. Tel est Edward Bulwer, premier Lord Lytton. Il a fait successivement du Byron et du Scott, du réalisme domestique et du romantisme historique, des histoires du bas crime et du grand monde. Puis il est devenu psychologue à la façon de George Eliot, mystique, scientifique, prophétique dans The Coming Race, et il a même esquissé le roman de l’au-delà. C’est un manœuvrier, un politicien de la littérature, tout comme Disraëli dont les romans ne sont que des maquettes enluminées.

Anthony Trollope (1815-1882) fut au contraire le chroniqueur fidèle, abondant, minutieux des villes de province anglaises, des tribus de clergymen au pied de leurs cathédrales, des familles et des groupes qui perpétuent l’existence sociale de la campagne. Ses livres furent écrits avec une régularité de production mécanique — tant de mots à l’heure, chaque matin avant déjeuner, pendant toute une vie de fonctionnaire. Il a peut-être, mieux que personne, représenté la vie calme, pas pressée, satisfait les goûts solides et tranquilles de l’Angleterre moyenne au temps de Victoria.

Charles Reade (1814-1884) ne mérite pas moins d’attention, à cause du génie véritablement original, toujours fidèlement, passionnément documenté, qu’il apporta dans ses romans sociaux et historiques. Avec celui de Charles Kingsley (1819-1875), socialiste chrétien, poète,