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Roman anglais depuis la guerre 239 De tous les écrivains de la jeune génération, c'est Miss Dorothy Richardson qui paraît aller le plus loin et le plus consciemment vers une rénovation totale du roman anglais. Est-ce une rénovation ou une petite maladie? Il faut se garder de toute décision hâtive. A peine le mouve- ment que nous signalons est-il franchement ébauché. Nul ne sait où va ce vent du matin. Comme l'Esprit, il souffle où il veut II est possible qu'il ait fini de souffler avant que la présente feuille ait fini de sécher. Les novateurs, ou plutôt les novatrices, n'ont pas de doctrine et ne forment pas école. La principale d'entre elles pro- clame et réclame son indépendance absolue. 11 est un point, toutefois, où se rencontrent, sans trop te savoir, les jeunes écrivains qui sont en train une fois de plus de briser le moule classique du roman anglais pour en faire on ne sait encore quoi : des débris, ou des statuettes. Et ce point, le voici. Au début de la présente étude, nous avons dit que le genre roman n'existait en Angleterre que depuis cette époque, vers la fin du dix-huitième siècle, où il avait inscrit dans son programme à la fois : Le récit, le mouvement, c'est-à-dire un minimum d'action, une combinaison d'événements extérieurs, simple ou savante, mais en tout cas palpable et progressive. Les caractères, c'est-à-dire une analyse intérieure des personnages, plus ou moins explicite, plus ou moins ex- primée ou exprimable, soit par l'auteur, soit par les faits, mais en tout cas réelle, intentionnelle, et aboutissant à un développement psychologique ou moral. L'émotion, la sensibilité, le pathétique, comme disaient les vieux rhétoriciens, c'est-à-dire un appel aux passions humaines, et avant tout, par-dessus tout, à la plus forte, celle de l'amour, avec l'inévitable déroulement de ses conséquences.

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