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renouvelé, rajeuni. Ses premiers livres étaient écrits dans une langue quasi-prophétique, et il reste encore quelque chose d’extatique dans ceux qui suivirent. Les derniers sont infiniment plus directs.

Elle est tombée dans Tasker Jevons sur un type moderne d’écrivain, qui fait songer à Dickens, Wells, Arnold Bennett. Issu des plus basses régions sociales, il réussit avec ostentation tout ce qu’il entreprend, et entreprend insolemment tout ce qui le tente ou le défie. C’est un volcan d’énergie. Un puffisme inné s’allie en lui à la générosité, et même à la sensibilité, la simplicité la plus exquise. Il compromet sans le savoir, avant de l’épouser, une jeune fille de cette bourgeoisie délicieusement, absurdement archaïque, qui fleurit à l’ombre des cathédrales de province. Ni le succès de son œuvre, ni la beauté manifeste de son caractère, ne peut effacer la tare d’origine que révèlent encore ses manières. Il ne conquiert sa nouvelle famille que par le suprême témoignage, un sacrifice silencieux de soi-même.

On trouve ces caractères plus grands, plus marqués que nature, dans beaucoup de romans des dernières années. Le personnage extraordinaire est revenu à la mode. Sa carrière est décrite avec une exactitude, un luxe de détails, de dates, par exemple, — une précision quant aux affaires d’argent, dont Samuel Butler avait donné le précepte et l’exemple. C’est du romantisme avec des procédés réalistes. Miss May Sinclair s’y est essayée dans Tasker Jevons, qui est un des livres les plus curieux, les plus vivants, qu’on puisse imaginer, malgré la prolixité du récit. Quelle romancière anglaise apprendra jamais à composer ?

Tasker Jevotts marquait bien un tournant dans le développement littéraire de Miss May Sinclair. Malgré sa