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Je sais bien tout ce qu’on peut reprocher à cette littérature féminine, si souvent prolixe, parfois puérile. Mais on reste confondu devant sa richesse, sa fidélité, et, somme toute, on admire à quel haut niveau peut se maintenir une pareille masse de fiction.


Toutes ces romancières ne sont pas au même degré des émancipatrices et des révolutionnaires. Mais il y a chez toutes, et c’est là ce qui les distingue de leurs devancières, un sens aigu de rénovation, une impatience plus ou moins contenue des conditions sociales léguées au xxme siècle par le xixme. Quand cette vague de revendications et de récriminations se fut étalée, divisée, perdue, après avoir dissous des montagnes de sable et vainement battu quelques rocs ; quand, épuisée par ses nombreux succès, et calmée par quelques échecs, elle eut perdu quelque peu de sa force bruyante, le temps était propice pour des études féminines moins chargées de l’esprit de polémique. Il eût été possible de revenir à ce qu’il y a d’élémentaire et d’éternel dans le rôle comme dans la nature de la femme. Le terrain était déblayé, l’état de l’opinion et des mœurs permettait d’apporter plus de franchise, de sincérité, dans la peinture et la discussion de mainte question encore inexplorée. Après les suffragettes en mal de puissance, on eût entendu les simples femmes en mal d’amour ou d’argent, tourmentées par leur sexe et leur conscience, ignorantes et hésitantes devant la maternité, le travail sans le salaire ou le salaire sans le travail qu’apporte souvent le mariage. Mais la guerre était proche et sa grande voix allait étouffer toutes les autres.

Quelques romancières avaient pourtant fait entendre cette nouvelle note dans le roman féminin. La plus remarquable est Miss May Sinclair.