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romanciers d’aventures de la fin du XIXme siècle. Aucun d’eux n’a rien produit de comparable à l’œuvre de Cunninghame Graham, voyageur, orateur, politicien socialiste, membre du Parlement, et excellent écrivain par surcroît. Peu d’hommes ont plus complètement, plus amoureusement exploré l’univers, héritage commun de tous les hommes. Aucun n’a plus obstinément cherché le contact avec les races encore frustes, et plus souvent rencontré, plus heureusement traduit, ce qu’elles gardent encore d’original, d’irréductible à la civilisation. Espagne, Maroc, Mexique, Pampas, il a interprété ces terres de la violence latine et arabe, sans intention et sans système littéraire, sans autre souci que celui de la vérité ; son langage est nerveux, incisif, rapide, plein de saveur, fertile en raccourcis, et il est probable que sa renommée ne fera que grandir.

Le naturaliste W. H. Hudson est un spécialiste de l’Amérique du Sud. Ses nouvelles et quelques-uns de ses romans lui assurent une place dans l’histoire littéraire. Green Mansions est l’odyssée d’un Vénézuélien sur le Haut Orénoque. La beauté des descriptions et la noblesse de l’allégorie en font, à mon avis, une des meilleures productions du genre.

Hall Caine (aujourd’hui Sir Hall Caine), avec sa vulgaire crudité, ne manque pas d’habileté dramatique. Sa liaison avec Rossetti l’avait déjà fait connaître, quand deux méchants feuilletons : The Shadow of a Crime (1885) et A Son of Hagar {1887), lui assurèrent une incroyable popularité. Il a écrit des romans sur l’île de Man, où la rhétorique, la prétention littéraire, n’ont d’égales que l’invraisemblance. Aucun romancier contemporain de l’Angleterre, sauf peut-être Marie Corelli, n’a contribué davantage à fortifier le mauvais goût, en y sacrifiant.