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RABELAIS
ET
SES ÉDITEURS



Rabelais, le savant le plus complet, le penseur le plus profond, l’écrivain le plus habile du seizième siècle, Rabelais fut un homme heureux. Protégé par les rois et les grands, estimé des savants et des lettrés, aimé de tous, il se sentit assez fort pour attaquer les abus les plus imposants, les plus profondément enracinés, ceux mêmes que le bras séculier entourait d’une protection active, et il leur posta des coups dont ils ne se sont pas relevés. Ce contempteur de la Sorbonne, ce ferrailleur impitoyable qui, de son arme à deux tranchants, frappait à droite et à gauche, ici sur les « moines moinant de moinerie, » là sur les « demoniacles Calvins imposteurs de Genève », ce philosophe complétement émancipé s’éteignit dans son lit, tranquille et considéré, tandis que ses amis, de simples hérétiques, mouraient dans l’exil, comme Marot, ou sur le bûcher,