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cassé le jour… Mon uniforme… est-ce que je ne pourrais pas le mettre ici, mon uniforme, hein, mar’chef ?

— Non.

— Sans vous manquer de respect, nous ne sommes pourtant plus au Sault-Sainte-Marie. Il n’y a qu’un sauvage sur le vaisseau. S’il disait un mot je…

— Je te défends de rendosser ton uniforme.

— C’est que ça me permettrait de fumer !

— Comment ! comment ! quelle sottise nouvelle encore.

— Puisque, dit Godailleur d’un ton larmoyant, j’avais cassé ma pipe, une pipe si bonne que vous m’aviez donnée il y a cinq ans, au régiment, puisque je l’avais cassée le jour… le jour… où vous m’avez retiré la permission… de porter… mon uniforme de petite tenue… j’ai… j’ai juré… mar’chef… de ne plus fumer avant de l’avoir sur le dos…

— Oh ! le niais ! je te donnerai une autre pipe.

Jacot hocha mélancoliquement la tête.

— Ça ne sera pas comme l’ancienne… celle-là vous m’en aviez fait cadeau le soir de votre promotion au grade de mar’chef. Ah ! je m’en souviens comme d’aujourd’hui ! vous sortiez de la cantine… vous aviez arrosé les galons, sans vous manquer de respect, mar’chef… C’était le bon temps… J’espérais que nous y resterions toujours au régiment… Dans deux ans, que je me disais, nous serons sous-lieutenant… on s’en donnera alors du loisir… L’an-