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L’allégresse était partout, dans les cœurs comme sur les visages, car l’hiver avait été dur ; on avait cruellement souffert du froid et du manque de provisions au Sault-Sainte-Marie, — plus d’un imprévoyant était mort de faim, — et le départ de la Mouette annonçait le départ des mauvais jours, le retour de l’abondance et de la belle saison.

À midi un coup de canon résonna.

C’était le signal pour lever l’ancre.

— Ma conscience ! je suis tout comme un enfant, dit le père Rondeau à Dubreuil ; je vous connais à peine et déjà je vous aime autant que si vous étiez mon fils. Laissez-moi vous embrasser ; ça me fera du bien.

— Oh ! de tout mon cœur, répondit Adrien, en se précipitant dans les bras du bonhomme.

— Et moi ! soupira la bouche grimaçante de l’ex-cavalier de première classe.

— Toi ! repartit Rondeau, ça serait déjà fait si je n’avais peur de tes crocs et de ta figure en lame de rasoir, Mais, tiens, ça ira tout de même. Viens ici.

— Sans vous manquer de respect, dit Jacot, en accolant vigoureusement le Canadien, qui lui souffla à l’oreille :

— Mon garçon, prends bien soin de ton maître, c’est le meilleur des hommes ! tu m’en réponds, entends-tu !

— On vous obéira, sans vous manquer de respect, papa Rondeau.