— Attendez, j’allume mon calumet.
Ce disant, il tira de sa poche une torquette ou rouleau de tabac, cordé comme un fouet et de la grosseur du pouce, en coupa, par tranches, une petite quantité sur la table, acheva de réduire en pièces les hachures, en les frottant fortement entre les paumes de ses mains, puis il bourra un fourneau de pierre, fixé à un roseau, et, avec un champignon sec, en guise d’amadou, mit le feu à son tabac.
— Si vous en désirez ? fit-il ensuite.
— Merci, répondit Adrien, j’ai des cigares.
Le Canadien offrit aussi sa pipe au dragon.
— Pouah ! j’ai mon brûle-gueule ! exclama Jacot.
— Vous disiez donc, questionna de nouveau le père Rondeau, un coude appuyé sur la table, la tête dans la main, les yeux à demi clos, et dans l’attitude d’un homme qui digère délicieusement ; vous disiez donc, bourgeois…
— C’est une affaire de mines qui m’a amené en Amérique.
— Ah ! j’entends. Quelque compagnie…
— Oui et non. Je dois explorer le terrain, et si les fouilles répondent à mon attente…
— Mais, de quel côté vous dirigez-vous ?
— On m’a parlé de la pointe Kiouinâ.
— Connu. Il y a déjà des Bostonnais[1] qui y travail-
- ↑ Depuis l’insurrection de 1775, les Yankees sont souvent ainsi appelés par les Canadiens, parce que Boston fut un des principaux foyers de cette insurrection.