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il lui plaisait de s’arrêter ; et cette demeure on l’estimait privilégiée. On l’aimait, on la jalousait.

L’étranger restauré, reposé, chacun faisait cercle autour de lui pour l’entendre raconter ce qu’il avait vu, ce qu’il savait.

Puis, quand il partait, les vœux de la famille qui l’avait gratuitement hébergé l’accompagnaient.

Souvent même on se disputait le plaisir de lui offrir des provisions et de le conduire à plusieurs lieues de la localité où il avait fait halte.

Tout cela est bien changé en Europe, tout cela change rapidement en Amérique.

Un siècle, moins peut-être encore, et le désert, avec ses merveilleux récits de chasse, de pêche, de guerre, ne sera plus qu’un souvenir dont l’idée se heurtera fréquemment à l’incrédulité.

Des bateaux à vapeur, des chemins de fer relient déjà le lac Supérieur au monde policé : on projette un railroad à travers les prairies du nord-ouest et les montagnes Rocheuses, pour marier l’océan Atlantique à l’océan Pacifique.

Sans la guerre qui désole présentement l’Union américaine, cette immense artère serait, certes, en voie d’exécution ; ainsi, les vieilles habitudes des chasseurs nord-ouestiers, les antiques exploits de la race rouge n’auront plus bientôt d’autres annales que la légende et la tradition.