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mère qu’il ne reverra plus, qui jamais, non, jamais, ne saura sa misérable destinée !

À elle ! à elle, la digne et vertueuse femme, sa pensée suprême ! car le dernier lien qui retenait le bouleau à la rive s’en est séparé et déjà les vagues entraînent le tronc !

Mais non ; ils ne périront pas. La Providence ne le permettra point. Elle étend sur eux une main protectrice.

En glissant contre le rocher, le bout de l’arbre, coupé en biseau, rencontre une fente, il s’y arrête, s’y encastre. Et, loin de le desceller, les flots rageurs ne font que l’enfoncer plus profondément dans cette mortaise naturelle.

Moins d’une minute après, Adrien et son compagnon sont sur le rivage.

— On m’appelle Shungush-Ouscta, dit l’Indien au Français ; si jamais mon frère a besoin d’un bras pour le servir, qu’il se souvienne de ce nom.

— Comment, vous parlez ma langue ? demanda Adrien

— C’est la langue des vaillants.

— Merci du compliment !

— Dans ma famille, la plus puissante des Nadoessis, tout le monde la parle et l’écrit.

— Vous écrivez aussi le français !

— Une Robe-Noire[1] l’apprit à mon grand-père, qui nous donna le secret de cette grande médecine.

  1. Missionnaire.