— Après tout, un jour ou un autre, ça devait m’arriver.
— Mais on fera une enquête ? demanda Dubreuil.
— Une enquête !
— Oui. un procès ? continua l’ingénieur tremblant.
— Un procès, ici ! Ça serait du beau, ma foi ! Qui aurait jamais vu ça ? On nous lynchera, mon brave !
— Que voulez-vous dire ?
— Ah ! vous n’êtes pas du pays, vous, ça se sent. Eh bien, être lynché, ça signifie être accroché par le cou à un arbre ou à une potence, sans jugement d’aucune sorte, et pourtant « jusqu’à ce que mort s’ensuive, » ajouta-t-il avec un ricanement cynique.
Dubreuil frissonna, et passa le reste de la nuit livré aux plus violentes impressions.
Le Mangeux-d’Hommes ne prononça pas une parole, ne laissa pas échapper une plainte, quoiqu’il souffrît atrocement de ses blessures.
Parfois ses yeux s’attachaient avec intérêt sur Dubreuil ; il eut l’air de vouloir lui communiquer quelque chose, et cependant il demeura muet.
Dès le matin, un roulement de tambour annonça un événement extraordinaire.
On fit sortir les prisonniers de la salle où ils étaient entassés.
Devant le bureau de la compagnie il y avait une esplanade, et sur cette esplanade trois grands chênes, dont