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Si les mécontents se retirèrent en murmurant, ils n’osèrent tenter la plus légère démonstration d’hostilité.

Depuis leur départ, je jouis ici du repos le plus absolu. Jésus m’a donné ma liberté sur parole. Mais tous mes mouvements sont surveillés, je le sais. Mon temps s’écoule entre la pêche, la chasse, quelques excursions dans le voisinage et l’étude des mœurs indiennes.

Ces mœurs sont curieuses à plus d’un titre. En veux-tu une esquisse, mon cher Ernest ?

L’Indien de l’Amérique septentrionale n’est pas, suivant moi, un être primitif. Il a vu, il a connu une civilisation fort avancée, je le crois, et dont on retrouve une forte trace dans ses traditions, dans ses usages, dans son culte, dans sa langue. Cette civilisation devait se rapprocher de la civilisation asiatique. La proximité de l’Amérique avec la Chine vient à l’appui de mon assertion. Je pense que le détroit de Behring a été formé, dans des âges très-reculés, par une convulsion terrestre, qui aurait divisé en deux vastes portions l’immense empire mongolique. Nos Américains furent policés, ils eurent des villes, le comfort des arts et du luxe. Mais l’invasion les repoussa dans les contrées inhabitées. Là, ils oublièrent peu à peu, dans leur lutte pour la pressante satisfaction des besoins matériels, le culte des sciences et des choses belles. De peuple pasteur ou commercial, ils devinrent peuple chasseur, guerrier.

Ne va pas m’objecter qu’alors ils auraient conservé le