un jour on la trouva au jardin, une pomme sur la tête, servant, sans
sourciller de but aux flèches de ses frères ; tels étaient la solidité de
ses nerfs et son mépris du danger. Pleine d’enthousiasme patriotique,
elle détestait dans Napoléon l’envahisseur de sa patrie ; elle avait vu,
en 1809, les Français entrer à Vienne et s’y installer en vainqueurs.
Sa mère l’ayant forcée d’assister à une revue, elle ferma résolument
Vue de Trieste.
les yeux, et put dire ainsi qu’elle n’avait jamais vu l’oppresseur de
son pays.
Lorsqu’on voulut lui faire quitter ses costumes de garçon, elle tomba malade de chagrin, et ses parents durent lui rendre la blouse et la casquette auxquelles elle tenait tant ; cette concession la guérit comme par magie. Ce ne fut qu’à treize ans qu’elle comprit, bien à contre-cœur, qu’il fallait y renoncer. Les travaux féminins, avoue-t-elle, excitaient son mépris. L’étude du piano surtout lui semblait une occupation tellement odieuse, que, pour échapper à ces « exercices », qui ont du reste désespéré plus d’une pensionnaire, il lui arrivait de se couper les doigts et de se blesser sérieusement. Nous avons parlé