Page:Chevalier - Les derniers Iroquois, 1863.djvu/272

Cette page a été validée par deux contributeurs.
— 264 —

naguère s’épanouissaient sur ses joues. Son sourire s’était éteint ; plus de gaieté maligne dans ses yeux, plus de fines plaisanteries sur ses lèvres. Triste, songeuse, indifférente à ce qui faisait autrefois son bonheur, elle s’abandonnait à un désespoir profond.

Madame de Vaudreuil fut effrayée de l’altération de ses traits. Elle demanda à M. de Repentigny la permission de l’emmener avec elle. Le haut fonctionnaire accepta volontiers cette proposition. Mais, contrairement à ses habitudes, Léonie voulut huit jours pour réfléchir.

Durant ces huit jours, elle écrivit plusieurs fois à Caughnawagha, elle y envoya même secrètement son frère de lait. Quand il revint, les yeux de la jeune fille l’interrogèrent :

— Rien, répondit Antoine, en secouant la tête. On sait seulement qu’il a échappé au désastre de Saint-Eustache ; mais si sa mère connaît sa retraite, elle ne veut pas la découvrir.

Le lendemain, Léonie partit avec sa tante pour la baie de Ha-ha. Elle était plus sombre encore qu’à l’ordinaire, et ni les distractions d’un voyage de quatre-vingts lieues en goëlette, ni le pittoresque et la variété des sites ne triomphèrent de sa mélancolie.

Elles arrivèrent à la fin de juin, dans le moment où une nature prodigue étale toutes ses magnificences sur le continent américain, et y dispose tous les êtres à l’expansion, à l’amour.