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poitrine. Ses traits altérés, ses veines gonflées, la sueur qui ruisselait sur ses épaules, attestaient la violence de son émotion. Peut-être serait-il parvenu à se délivrer, mais un des assistants lui assena sur le crâne un coup de tomahawk ; un flot de sang jaillit ; il fut pris d’un frémissement général, qui dura quelques secondes ; ses muscles se détendirent, sa tête pencha sur le côté, et il demeura immobile, comme privé de vie.

Pendant ce temps, la pauvre femme, ranimée par une cruelle fustigation, avait été reconduite au bûcher, où, malgré ses plaintes déchirantes, malgré ses résistances, quatre bourreaux l’obligeaient à poursuivre sa terrible opération. Et pendant ce temps aussi les Grosses-Babines continuaient leur scène infernale. De leurs poitrines bondissaient non plus des chants, mais des beuglements assourdissants ; de leurs tambourins frappés à tour de bras, ils tiraient des notes inimaginables, qui retentissaient à plusieurs milles à la ronde ; et au milieu de ce hourvari ils se démenaient comme une légion de démons.

C’était un spectacle hideux, capable de glacer de terreur les plus hardis.

Il se prolongea au-delà d’une heure ; et, durant ce long intervalle, l’Indienne fut contrainte de veiller à ce que le cadavre conservât une position convenable.

La crémation finie, notre misérable héroïne avait les doigts calcinés jusqu’aux os, le visage et les mains labourés par des cicatrices profondes.