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CHAPITRE V

La Caverne


Quelques jours s’étaient écoulés depuis les précédents événements. Les plaines de l’Amérique septentrionale s’animaient aux fécondantes caresses du mois de mai. L’instant où les Trappeurs se mettraient en marche pour gagner les territoires de chasse approchait de plus en plus ; aussi la gaieté régnait dans le camp. Plus d’une fois Kenneth avait tenté de se mettre en rapports plus intimes avec Sylveen Vander ; mais, soit coquetterie, soit insouciance, la charmante jeune fille paraissait ne pas le remarquer. Iverson se piqua au jeu, et bientôt il s’avoua qu’il aimait cette belle enfant.

Une après-midi qu’il était sorti, suivant son habitude, pour faire une promenade à cheval, ses rêveries l’entraînèrent à plusieurs milles du camp, sans qu’il s’inquiétât de la route que parcourait son coursier. Vers dix heures, il arriva à une délicieuse pelouse, toute diaprée de fleurs, et arrosée par une source jaillissante. Ce lieu invitait au repos. Sautant à terre, le jeune aventurier attacha son cheval à un arbre et s’étendit sur un frais tapis de mousse où le sommeil ne tarda pas à le surprendre. Combien de temps dormit-il ? Il eût été fort en peine de le dire ; mais tout à coup un ricanement sec et sarcastique le réveilla en sursaut. Levant les yeux, Kenneth vit deux hommes qui venaient de saisir son cheval par la bride. À cette vue, son voyage sur la rivière Severn ; le débarquement ; les regards sinistres ; le café drogué ; la vision ; ses extases ; la privation