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CHAPITRE IV

Le duel


Le soleil allumait à l’orient ses rayon vivificateurs. Aucun nuage ne faisait ombre à la pureté de la voûte azurée. L’air était embaumé des suaves senteurs du printemps. Une brise balsamique, parfumée comme l’haleine des jeunes filles, jouait follement dans les forêts et prairies.

Sortant de leur tente, Kenneth Iverson et Nick Whiffles marchèrent vers le lieu du rendez-vous. Ils paraissaient peu disposés à causer. Nick était mécontent et regardait souvent Kenneth à la dérobée. Le jeune homme avait l’air sérieux, mais d’un calme parfait.

— Mon ami, dit enfin Nick, avec un effort évident, ça me semble une vilaine affaire. Je voudrais bien que cette diablesse de petite difficulté fût réglée.

— Impossible, dit Kenneth.

— Oui, c’est vrai. S’il ne vous avait frappé avec son gant, ça serait différent. Je ne vois pas le moyen de vous en tirer, bien sûr. C’est un fin tireur au pistolet, et j’ai peur d’être obligé de vous enterrer dans la prairie, malgré toute la peine que je me suis donnée, en vous fouettant pour vous ramener à la vie, l’hiver dernier.

— Si, répliqua lentement Kenneth, vous êtes contraint de remplir, pour moi, le triste devoir de la sépulture — et les chances sont égales — quand vous m’aurez confié à ma dernière demeure, promettez-moi que vous ferez parvenir jusqu’à mon pays les lettres que j’ai écrites et laissées dans ma tente !