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Mark, en prononçant ces mots, frappait le sol du pied et saisissait ses cheveux à pleines mains, comme pour les arracher. Sylveen s’aperçut un peu tard qu’elle avait touché une fausse corde et essaya de réparer sa maladresse.

— Ce garçon m’a toujours été fidèle et dévoué, reprit-elle.

— Et c’est justement pour cela que je le tue, dit Mark avec un ricanement sinistre. S’il eût été votre ennemi, il ne serait pas en ce lieu. La petite vipère n’aurait pas rampé jusqu’ici, pour piquer. Par bonheur que sa finesse n’a pas égalé sa hardiesse.

Morrow fit une pause et ajouta bientôt d’un ton véhément :

— Aveugle que j’étais ! m’être laissé duper par ce faux prêtre ! Et cet Indien converti ! peuh ! Nick Whiffles déguisé !

Il se mit à arpenter la salle à grands pas, et, au bout de quelques minutes, vint se planter devant Sylveen. Son visage portait l’empreinte d’un cachet diabolique.

— Écoutez, ma fille, s’écria-t-il, votre ami et champion Nick Whiffles est arrivé au terme de sa dernière piste. Dites adieu à ses contes et à ses bouffonneries.

— Mort ! dit Sylveen, frappée d’une terreur nouvelle.

— Mes gens ont jeté son cadavre dans le lac. Il repose avec les poissons. Les serpents d’eau feront sans doute leur nid dans sa carcasse.

— Prenez garde ! prenez garde ! cria la jeune fille éperdue.

— Grand guerrier ! diablement brave ! dit Le Loup, s’enflammant au souvenir de Nick.

— Ah ! ah ! ça vous touche, la belle ! mâchonna Mark entre ses dents. Je suis enchanté, ma parole, de rompre votre apathie. Vous apprendrez peu à peu qui je suis. Ah ! ah !

— Eh ! je ne vous connais que trop ! Mon imagination ne peut concevoir un monstre plus monstrueux que vous ! répliqua Sylveen avec un accent qui attestait la sincérité de sa déclaration.

— Bien, continuez ! allons, poussez-moi à bout ! Je vais envoyer chercher deux de mes gens qui soigneront votre beau protégé. Profitez des moments qui vous restent encore pour jouir de sa précieuse société. Quand il disparaîtra de votre vue, ce sera pour la dernière fois.

Puis à Le Loup :

— Jeune sauvage, contemple ton idole jusqu’à ce que se montre