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Il faut qu’il se défende, lui et sa famille, contre la faim, contre le froid, contre toutes les intempéries des saisons. Il veut non-seulement conserver, mais orner sa personne et celle de ses enfants ; il veut rendre commode sa demeure. Tout cela est essentiellement personnel, c’est le cri du moi, qui lutte pour s’approprier des objets extérieurs. Voilà pourquoi l’acte de produire de la richesse a toujours été et sera toujours, en vertu de la nature humaine, par l’ordre suprême du Créateur qui a composé cette nature, un acte personnel, relatif à l’individu ou au petit monde de la famille. Les besoins de l’homme sont tellement pressants, il y faut une satisfaction tellement immédiate, tellement incessante, qu’il n’y aurait pas moyen d’y subvenir si chacun n’en faisait son affaire personnelle.

On en a fait la remarque avec beaucoup d’à-propos dernièrement : plus la société s’est perfectionnée, plus la propriété y est devenue individuelle, ce que nos adversaires appellent égoïste, en se dégageant successivement des liens de la communauté où, dans les imparfaites sociétés des temps primitifs, elle était plus ou moins asservie[1].

Il s’est passé là un double phénomène d’action et de réaction : d’une part, à mesure que le progrès de la société, développant la liberté, investissait la personnalité humaine de nouvelles garanties, la propriété de la terre et des capitaux en général tendait à être de plus en plus individuelle. D’autre part, à mesure que la personnalité humaine était plus encouragée à posséder la richesse, et par conséquent à la produire, une circonstance, favorable au progrès général de la société se manifestait de plus en plus. C’est un des aspects du progrès social que la masse de produits de toute sorte, aliments, vêtements et tout le reste, qui est sans cesse crée et recréée par l’activité de la société,

  1. Cette proposition a été fortement motivée par M. Franck, membre de l’Institut, dans son écrit du Communisme jugé par l’histoire.