Page:Chesterton - Le Nommé Jeudi, trad. Florence, 1911.djvu/241

Cette page a été validée par deux contributeurs.

L’éléphant avait laissé les cabs assez loin derrière lui. Les détectives l’avaient perdu de vue, au tournant des coins de rue, et, quand ils parvinrent à l’une des portes de l’Exposition d’Earl’s Court, ils se trouvèrent bloqués. Devant eux s’agitait une foule énorme autour d’un énorme éléphant ; l’animal tressaillait comme une bête forcée. Quant au Président, il avait disparu.

— Où donc est-il ? demanda Syme en mettant pied à terre.

— Le gentleman est entré en courant à l’Exposition, lui dit un gardien effaré.

Et il ajouta, du ton d’un homme offensé :

— Singulier gentleman, monsieur ! Il m’a prié de tenir son « cheval » et voilà ce qu’il m’a donné.

D’un air dégoûté, il montrait une feuille de papier, pliée, avec cette adresse : « Au secrétaire du Conseil suprême des anarchistes. »

Le secrétaire, furieux, ouvrit ce papier et y lut ceci :

Quand le hareng court un mille,
Le secrétaire peut sourire ;
Quand le hareng s’envole,
Le secrétaire doit mourir.

(Proverbe rustique.)

— Pourquoi diable ! s’écria le secrétaire, avez-vous laissé entrer cet homme ? Vient-on d’ordinaire à votre Exposition à dos d’éléphant enragé ?