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levées avec les couteaux et les fourchettes à poisson !

— Eh ! je l’espère bien, répondit le président avec quelque animation.

— L’avez-vous vu ? souffla l’hôtelier anxieusement. Avez-vous vu le domestique qui les a enlevées ? Le connaissez-vous ?

— Si je connais ce domestique ? répondit M. Audley avec indignation. Non, certainement.

M. Lever ouvrit les mains, avec un geste de désespoir.

— Je ne l’ai jamais envoyé, dit-il, je ne sais ni d’où ni comment il est venu. J’ai envoyé mon garçon enlever vos assiettes et, lorsqu’il est arrivé, elles n’étaient déjà plus là.

M. Audley sembla, en ce moment, trop troublé pour paraître vraiment le grand homme que réclame l’Empire. Personne ne trouva rien à dire sauf l’homme de bois — le colonel Pound — qui fut comme électrisé. Il se leva avec raideur, tandis que les autres restaient assis, se vissa le monocle dans l’orbite et dit, d’un ton rauque, à mi-voix, comme s’il avait en partie perdu l’usage de la parole :

— Voulez-vous dire que quelqu’un a volé notre service à poisson ?

Le propriétaire réitéra son geste, avec une expression, si possible, encore plus désespérée, et, à l’instant, tous les membres du club se levèrent de table.

— Tous vos domestiques sont-ils ici ? demanda le colonel, de sa voix basse et rude.

— Oui, ils sont tous ici. Je l’ai remarqué,