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bienveillants. Ils désiraient que la chose — quelle qu’elle fût — prît fin. Elle prit fin. Après être resté figé, durant quelques secondes, dans une rigidité de cataleptique, le domestique fit demi-tour et sortit de la salle en courant comme un fou.

Lorsqu’il réapparut dans l’embrasure de la porte, il était accompagné par un autre domestique, auquel il parlait à voix basse, en gesticulant avec une animation toute méridionale. Alors le premier garçon se retira, laissant derrière lui le deuxième, et en ramena bientôt un troisième. Lorsqu’un quatrième garçon se fut joint à ce fiévreux synode, M. Audley crut nécessaire de rompre le silence dans l’intérêt du Tact. Il toussa bruyamment, n’ayant pas à la main son marteau présidentiel, et dit :

— Superbe effort que le jeune Moocher accomplit, en ce moment, en Birmanie. Aucune autre nation au monde n’aurait pu…

Un cinquième domestique s’était précipité sur lui comme une flèche et lui murmurait à l’oreille :

— Pardon, monsieur. C’est urgent. Le propriétaire pourrait-il vous parler ?

Le président se retourna bouleversé et vit, avec stupeur, s’approcher M. Lever. Le propriétaire avait conservé la même démarche, à la fois pesante et rapide, mais son visage s’était profondément altéré. De brun bronzé, il était devenu jaune pâle.

— Vous voudrez bien m’excuser, monsieur Audley, dit-il d’une voix d’asthmatique, mais j’ai de graves appréhensions. Vos assiettes ont été en-