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Cette fois, le Père Brown laissa tomber son papier et, la porte du bureau étant fermée, passa directement dans le vestiaire. Le gardien était absent, sans doute parce que les seuls hôtes étaient en train de dîner et que son emploi était devenu une sinécure. Après avoir cherché à tâtons son chemin à travers une forêt de pardessus, le prêtre s’aperçut que le vestiaire était séparé du corridor éclairé par un de ces comptoirs par-dessus lesquels nous avons tous passé nos parapluies en échange d’un numéro. Il y avait une lampe au-dessus de l’arcade semi-circulaire de ce comptoir. Mais elle éclairait à peine le Père Brown dont la silhouette noire se découpait sur la fenêtre, située derrière lui, et où s’éteignaient les derniers reflets du soleil couchant. Par contre, elle projetait une vive lumière sur le personnage arrêté devant le vestiaire, dans le corridor.

C’était un homme élégant, vêtu d’un habit très simple, de haute taille, sans avoir l’air pour cela d’occuper beaucoup de place. On sentait qu’il aurait pu glisser comme une ombre là où beaucoup d’hommes plus petits eussent paru encombrants. Son visage hâlé, éclairé par la lampe, avait une grande vivacité d’expression ; c’était le visage d’un étranger. Sa taille était bien prise, son allure respirait la confiance et la bonne humeur. Tout ce qu’un critique eût pu trouver à redire à son apparence, c’est que son habit n’était pas tout à fait à la hauteur de sa prestance et de son maintien, et se gonflait même aux poches d’une manière curieuse. Dès